La plage d’Omaha – nom de code reprenant le nom d’une ville du Nebraska – s’étend sur 6 km devant les villages de Vierville, Saint-Laurent-sur-mer et Colleville. Ce secteur s’insère entre Utah Beach, la seconde plage américaine et le secteur britannique Gold.
À l’entrée des vallées encaissées conduisant vers la plage, les Allemands ont édifié :
- pas moins de quatorze points d’appui fortifiés
- des murs et des fossés antichars
- des nids de mitrailleuses et de mortiers
- des champs de mines et de barbelés
Pour détruire ce système défensif tenu par la 352e division d’infanterie venue en renfort dès avril 1944, les Alliés ont prévu des bombardements aériens de nuit et des tirs d’artillerie de marine dès les premières lueurs de l’aube. C’est sur cette plage que doivent débarquer les 1re et 29e division d’infanterie des généraux Gerhardt et Huebner. La mission des fantassins est d’établir la liaison entre Utah Beach et Gold Beach, et une solide tête de pont sur 30 km de côtes avant d’avancer vers Saint-Lô.
Le bombardements des côtes
À 6h00, l’aviation prend le relais. 329 appareils Liberator de la 8e US Air Force américaine, protégés par 36 squadrons de Mustang et de Spitfire survolent les cotes pour y déverser les 13 000 tonnes de bombes embarquées. Évoluant au-dessus des nuages bas et craignant d’atteindre les troupes approchant du rivage, les bombardiers larguent leurs bombes à l’intérieur des terres, épargnant sans le savoir les fortifications côtières allemandes. Aussi lorsque à 6h30 les troupes d’infanterie foulent le sable d’Omaha, le système défensif allemand, peu entamé, est en capacité de repousser l’assaut américain.
La 1ère vague d’assaut à Omaha
À 6h30, les premières vagues d’assaut de la 1re division (la fameuse Big Red One) et de la 29e division d’infanterie débarquent sur les secteurs Charlie, Dog, Fox et au centre, Easy, là même où le photographe Robert Capa réalisera ses célèbres clichés. De violents courants côtiers ont déporté certaines unités des secteurs qui leur étaient assignés.
1 450 hommes appartenant aux 8 compagnies des 116e et 16e régiments se sont élancés. Face à eux, au-dessus de la plage, abritées derrière les talus, les unités de la 352e division d’infanterie du général Kraiss, attendent de pied ferme les assaillants tandis qu’entrent en action les batteries allemandes laissées intactes malgré les bombardements.

Sitôt mise à terre la compagnie A du 116e régiment est rapidement annihilée sur l’aile droite de l’assaut, le régiment perdant près de 1 000 hommes en quelques minutes. Partout le déluge du feu allemand est terrible, prenant en enfilade les Américains sur tous les secteurs. Deux compagnies se terrent au pied des Moulins, quatre autres s’agglutinent sous les hauteurs de Colleville, une dernière enfin s’est égarée tellement loin de son secteur qu’elle ne pourra débarquer qu’une heure trente plus tard.
Comble de malchance, sur les 83 chars amphibies envoyés avec la première vague, 35 coulent en pleine mer ou ont été détruits avant même d’atteindre les plages. Ceux qui sont parvenus sur la plage sont détruits par les pièces antichars. Après une demi-heure de combat, quelques combattants sont parvenus péniblement jusqu’à la levée de galets au pied de la colline. C’est dans ce terrible chaos, alors que la première vague n’est pas encore sortie de l’eau, que la 2e vague s’apprête à débarquer à 7h00.


La 2e vague d’assaut
La 2e vague d’assaut de la 29e division débarque comme convenu à 7h00, suivie trente minutes plus tard par les éléments de la 1re division. Sur la plage où la marée remonte, la confusion est à son comble, les hommes débarqués, souvent en état de choc, n’arrivent plus à avancer tandis que les pertes s’allongent de minutes en minutes.
À 8h00, les éléments du 16e régiment parviennent enfin à s’établir à l’abri du talus qui surplombe la plage. Le régiment de la Big Red One parvient à contourner le point d’appui allemand Wn 60, avant de s’en emparer une heure plus tard et de filer vers le Grand Hameau. Ils dégageront la première vallée à partir de 9h00. C’est dans ce secteur également que le colonel Georges Taylor du 16e RI lâchera à ses hommes une phrase restée célèbre :
« Deux sortes d’hommes resteront sur cette plage : les morts et ceux qui vont mourir. Alors foutons le camp d’ici en vitesse ! »
Dans le même temps, d’autres éléments du 16e régiments débarqués sur Easy Red parviennent à franchir le talus à l’abri des tirs allemands entre les WN 65 et 64.
Parallèlement, à l’est de Vierville, 500 hommes du 116e régiment et du 5e bataillon de Rangers escaladent la falaise et atteignent le plateau. Il s’agit là de l’une des toutes premières percées. Une heure plus tard, 600 hommes emmené par le général Cota, commandant adjoint de la 29e division, se sont regroupés pour marcher en direction de Vierville qui sera atteint vers 11h00.

Vers 9h00, les 2e et 3e bataillon du 116e régiment parviennent enfin à se hisser entre les points d’appui WN 65 et WN 66. Face à eux, les soldats de la 352e division d’infanterie continuent d’opposer une vive résistance, même si l’intensité du feu diminue quelque peu.
Un peu plus de 3 heures après l’heure H, le désenclavement de la plage d’Omaha s’amorce péniblement, au moment-même où le général Bradley, patron des forces terrestres, envisage l’abandon des opérations sur Omaha.
Les premières libérations à Omaha Beach

Le bourg de Vierville est atteint vers 11h00 et libéré vers midi par des éléments du 116e régiment d’infanterie. Ils neutralisent les points d’appui WN 65 et WN 64 vers 12h00 et permettent désormais l’accès à la sortie de plage vers la vallée du Ruquet. Les GI’s livrent de sérieux combats face à la 352e division pour contrôler une partie du bourg de Colleville sur mer. La libération totale du village n’interviendra que le lendemain matin. La libération de Saint-Laurent arrive enfin dans le milieu de l’après-midi par les bataillons du 115e régiments arrivés en renfort dans la journée. Ce village sera libre le lendemain.

Retrouvez le bilan du débarquement le 6 au soir ici
Qui est Robert Capa
Lorsque Robert Capa débarque sur Omaha, il est photographe de guerre pour Life magazine. Il a 30 ans. Il a déjà couvert la guerre sino-japonaise, la guerre d’Espagne. Ce jour-là il est le seul photographe à avoir été autorisé à débarquer avec la première vague d’assaut sur Omaha, secteur Easy Red. Pour saisir ce moment historique, Capa a emporté avec lui avec trois appareils photos. À bout de pellicule, il parvient à rembarquer sur une barge qui le conduit vers un navire hôpital. En état de choc, le photographe prend le temps de référencer ses 4 bobines de 6 rouleaux chacune. Arrivé à Weymouth, il décide de retourner aussitôt en Normandie et confie ses photos à un coursier de Life. Elles parviennent à Londres à l’heure du bouclage du journal. Le développement des clichés se fait alors dans l’affolement. Seules 11 photos floues seront récupérées sur l’ensemble du reportage. Capa sera de retour sur Omaha le 8 juin pour continuer à « couvrir » la bataille de Normandie. Il sera tué 20 ans plus tard, le 25 mai 1954, en sautant sur une mine tandis qu’il couvre la guerre d’Indochine au côté de l’armée française.
Qui est le général Bradley
Embarqué sur le croiseur lourd USS Augusta, le général Bradley, suit au large la bataille sur Omaha Beach. En tant que chef des forces terrestres américaines, il prend connaissance minute après minute de tous les rapports qui lui parviennent. Les nouvelles sont extrêmement mauvaises, ses armées sont en passe d’être massacrées sur Omaha. Devant le niveau de pertes alarmant et l’impossibilité des GI’s de s’extraire de la plage, Bradley envisage à 9h00 de réembarquer les survivants pour les redéployer sur des secteurs voisins moins meurtriers, Gold et Utah, avec le risque de laisser un trou béant dans la tête de pont alliée. Mais la situation à terre est en passe de s’améliorer. À 9h30 Bradley reçoit un radiotélégramme l’informant que « les troupes jusqu’ici clouées au sol sur les plages Easy Green, Easy Red et Fox Red progressent au-delà des hauteurs dominants les plages ». La demande d’autorisation de repli ne sera jamais donc envoyée à Eisenhower. De nouveaux renforts parvenus sur Omaha à 10h30 allaient faire définitivement basculer les troupes américaines dans le camp de la victoire.