Le secteur américain

La libération de Quinéville

Dans la presqu’île du Cotentin, les fortifications de Quinéville menacent depuis le 6 juin les débarquements de matériel américain sur la plage de Utah. Aussi, la prise du village a été confiée au 39e régiment d’infanterie de la 4e division. Le 14 juin, l’assaut est précédé à 9h15 d’un intense bombardement d’artillerie sur les crêtes et la plage. Quatre heures plus tard l’infanterie s’élance, avec en tête la compagnie K du 3e bataillon. À 14 h 00 le haut de Quinéville est pris. Mais à 15 h 00 les GI’s éprouvent toujours des difficultés à libérer le reste du village devant une résistance allemande bien organisée. Les premiers bunkers de la plage sont pris vers 17 h00.

La reddition allemande est effective à 21h30 après de sérieux combats. 300 soldats allemands sont faits prisonniers. La compagnie K compte 5 soldats tués et 28 autres blessés dans ses rangs. Tandis que Quinéville tombait aux mains des Américains, la garnison de la batterie du Mont Coquerel (4 canons de 105 mm de 12 km de portée) rendait également les armes. Au soir du 14 juin Quinéville marque alors le point le plus extrême de l’avancée américaine vers le Nord.

Pièce d'artillerie de 105 mm de la batterie du Mont-Coquerel.

Lourdes pertes pour le 507e régiment parachutiste le 14 juin

Devant la force résistance allemande empêchant la montée vers Cherbourg, la coupure de la presqu’île du Cotentin est devenue une priorité pour Bradley depuis le 9 juin. La 90e division d’infanterie a donc été lancée au-delà du Merderet en direction de Saint-Sauveur-le-Vicomte, sans résultats probants. La 9e division prend alors le relais, épaulée par des éléments de la 82e Airborne. Après un repos de 3 jours, le 507e régiment para se met en marche le 14 juin vers Saint-Sauveur le Vicomte au sud-est de La Bonneville. Placés rapidement sous le feu des mortiers et de l’artillerie ennemis, les trois bataillons du régiment progressent péniblement durant la nuit, à peine un kilomètre parcouru au petit matin. Les parachutistes du 507e tiendront leurs positions toute la journée, seront même pris pour cible par leur propre artillerie, avant d’être dépassés vers 18 h 00 par le 505e régiment. Au terme de deux jours de combats, le 507e régiment vient d’être sérieusement malmené : il perd dans cette bataille 192 hommes, tués, blessés et disparus.

Le secteur anglo-canadien

De Gaulle débarque en Normandie le 14 juin

Vers 13h00, au large de Courseulles et Graye-sur-mer, le général de Gaulle quitte la passerelle de la Combattante, un contre-torpilleur des Forces navales françaises libres, pour prendre pied sur le sol de Normandie. Quatre ans après son départ pour Londres, l’homme du 18 juin retrouve enfin la France. Ce jour-là, de Gaulle ne vient pas seul. Il est accompagné de 18 personnes, ses principaux collaborateurs, civils et militaires. À l’issue de longues et difficiles démarches avec les Alliés, le chef de la France Libre a reçu l’autorisation de se rendre sur la tête de pont alliée en Normandie.

À sa descente, il est accueilli par le major Sanderson qui a été envoyé par Montgomery. De Gaulle est aussitôt conduit au QG de « Monty » au château de Creullet pour une rapide entrevue, tandis que le reste du groupe conduit par François Coulet et le colonel de Chevigné prend la direction de Bayeux. Les hommes du Général ont très peu de temps pour annoncer aux habitants la visite du chef de la France Libre.

Mémorial de Caen
De Gaulle en visite au PC de Montgomery à Creullet.
Mémorial de Caen
Le général de Gaulle prend pied en Normandie sur la plage de Graye-sur-mer le 14 juin 1944.

De Gaulle entre dans Bayeux vers 15h30, accueilli par François Coulet et le conseil municipal de la ville. Il y installe à la sous-préfecture, où trône encore le portrait du maréchal Pétain, François Coulet, premier commissaire de la République et nomme Pierre de Chevigné délégué militaire des régions libérées.

De Gaulle s’entretient rapidement avec le sous-préfet Rochat pour s’informer de la situation dans la tête de pont, avant de se rendre à pied dans les rues de Bayeux. Dernier acte de cette visite bayeusaine : la place du château ou De Gaulle tient son premier discours en territoire libéré devant une population venue nombreuse.

De Gaulle quitte ensuite Bayeux pour se rendre au plus près de la zone des combats, à Isigny-sur-Mer, puis à Grandcamp-les-Bains avant de regagner Courseulles par le littoral. Il rembarque à bord de la Combattante à la nuit tombée, le devoir accompli : avoir pu restaurer en Normandie la légalité républicaine au nez et à la barbe des Alliés qui l’avaient jusqu’à présent tenu à l’écart d’Overlord et de l’administration future de la France libérée.

La libération de Lingèvres

Sur la route de la libération de Tilly-sur-Seulles, Lingèvres constitue un réel obstacle pour la 50e division d’infanterie britannique. Dans ce secteur, face à la Panzer Lehr, c’est le 9e Durham Light Infantry (151e brigade) qui a reçu le 14 juin pour mission de s’emparer de ce village. À cet instant, il ne reste que des ruines de Lingèvres, écrasé 4 jours plus tôt par les obus de marine de 152 mm du HMS Orion. Malgré l’appui de l’artillerie et des chasseurs-bombardiers, le régiment perd 246 hommes dont 20 officiers, tués, blessés ou disparus, pour la libération du village. La Panzer Lher n’entend rien lâcher et déclenche dans la journée une terrible contre-attaque. La division allemande perd dans cette opération 6 Panzer, tandis que le sergent Harris du 4/7 Dragoon Guards parvient à détruire cinq chars Panther dans les rues du village avec son seul char Firefly.

La libération d’Escoville

Au sud de la zone de largage de la 6e Airborne britannique, Escoville est resté occupé par les Allemands de la 21e Panzer au soir du 6 juin. Dès le lendemain, l’objectif fixé au 2e bataillon aéroporté des Ox and Bucks est la libération du village. Les paras britanniques libèrent Hérouvillette puis entre dans Escoville le 7 juin en fin de matinée, avant de quitter les lieux à la suite d’une contre-attaque allemande. Durant une semaine Escoville restera sur la ligne de front des deux belligérants. Le 14 juin, arrivée dans le secteur à l’est de l’Orne pour renforcer les forces parachutistes, la 51e division d’infanterie britannique parvient à s’emparer du village d’Escoville.

Les forces allemandes

La 12e Panzer SS perd son chef

Mémorial de Caen
Le 14 juin 1944, le SS Brigadeführer Fritz Witt, commandant de la 12e division SS est tué à Caen, à son PC, atteint par un tir d’obus de marine.

Promu général de brigade alors qu’il n’a que 35 ans, Fritz Witt commande la 12e SS Hitlerjugend depuis son arrivée en Normandie. C’est à lui que revient, malgré la dispersion de ses forces et les 12 heures de retard pris dans l’engagement de sa division le 6 juin, l’exploit d’avoir stoppé l’avance des Canadiens le 7 juin vers l’aérodrome de Carpiquet. Le 14 juin, tandis qu’il rentre d’une inspection quotidienne de ses unités sur le terrain, Fritz Witt trouve la mort à Caen, dans le quartier de Venoix, atteint par un éclat d’obus de marine tiré sur son Poste de Commandement. Le général Witt est remplacé deux jours plus tard par son subordonné, le colonel Kurt Meyer, qui devient à 33 ans le plus jeune chef de division du IIIe Reich.

Destructions allemandes au Havre

À partir du 14 juin, les Alliés bombardent les infrastructures portuaires du Havre et de Boulogne. Ce jour-là, 350 bombardiers de la Royal Air Force parviennent à anéantir les forces navales allemandes stationnées près du Havre : trois torpilleurs sont détruits à quai, une vingtaine de dragueurs de mines ou patrouilleurs, une vingtaine d’autres bâtiments, et onze vedettes lance-torpilles sont mis hors d’état. La situation navale allemande dans la Baie de Seine est devenue pour l’amiral Krancke, commandant du groupe naval Ouest, d’un seul coup catastrophique.

Les civils dans la guerre

La fin du maquis de Beaucoudray

Installé depuis avril 1944 à une vingtaine de kilomètres au sud de Saint-Lô, le petit maquis de Beaucoudray dont la trentaine de membres dirigés par Ernest Pruvost étaient parvenus à couper des câbles téléphoniques dans la nuit du 5 au 6 juin attend depuis le Débarquement le message qui le fera passer à l’action pour aider les Américains à marcher sur Saint-Lô. Isolés, sans renforts ni perspective d’actions armées, ses différents membres vivent cachés dans une ferme du village du Bois.

Le 14 juin, vers 10h30 la ferme est cernée par des combattants allemands. Sur les 19 hommes présents ce matin, 11 d’entre eux, tous membres du groupe Action-PTT de Saint-Lô, sont arrêtés, rassemblés dans la cour avant d’être transférés à la tombée de la nuit dans le village de La Réauté. Le lendemain matin, peu avant l’aube ils sont tous fusillés au lieu dit « L’oiselière de haut ». Les corps des victimes seront retrouvés au début du mois d’août au moment de la libération du secteur.

Vimoutiers et Mézidon sous les bombes

L’église de Vimoutiers est restée debout malgré les bombardements du 14 juin.

Jusqu’ici épargné par les combats, Vimoutiers qui abritait le 6 juin 1944 le train de la 12e SS Panzer est violemment bombardée le 14 juin. 36 bombardiers Marauders B 26 déversent à partir de 7h45 et en moins de 20 minutes 29 tonnes de bombes sur la cité. Des bombes incendiaires mettent le feu à la ville qui se retrouvera détruite à plus de 80%. Sur 1 900 habitants, 220 civils trouvent la mort. Le même jour, l’aviation alliée lâche ses bombes au-dessus de Mézidon, au nord de Saint-Pierre-sur-Dives, tuant sur le coup près de 50 civils. La Normandie continue à payer un lourd tribut pour sa libération.

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