Les secteurs américains

Omaha Beach

La prise des batteries de Maisy

Pendant que le 3e bataillon du 116e RI se lançait à l’assaut de Grandcamp, un autre bataillon du même régiment avançait sur Maisy. Les Allemands y ont installé deux batteries de campagne : une à Maisy-la-Perruque (6 pièces de 155 mm d’une portée de 20 km), l’autre à Maisy-la-Martinière (4 pièces de 105 d’une portée de 8 km). Bombardées dans la nuit du 5 au 6 juin ces ceux batteries sont rapidement neutralisées dans l’après-midi du 6 juin par les tirs de l’artillerie de marine. La seule résistance ennemie rencontrée par les fantassins américains et les blindés du 743e bataillon consiste en des tirs de mitrailleuses. À l’ouest du village le passage est cependant rendu plus difficile avec un point fortifié constitué de mortiers de 88 mm. À bout de carburant, ralenti par les Allemands, les blindés et les combattants américains marquent un temps d’arrêt dans la nuit du 8 au 9 avant de reprendre le matin suivant. Le 116e RI et le 5e Rangers s’emparent définitivement des batteries de Maisy dans la soirée après avoir enlevé dans la journée les derniers points de résistance autour de Grandcamp, Maisy et Gefosse-Fontenay.

La libération d’Etreham

À quelques kilomètres au sud de Port-en-Bessin, Etreham attend sa libération par les troupes américaines débarquées le 6 juin sur Omaha Beach. Depuis le 8 juin le 1er bataillon du 26e régiment (1re division d’infanterie américaine) se trouve immobilisé devant le village. L’appui de l’artillerie de marine est demandé par les fantassins avant de lancer l’assaut. C’est le destroyer Baldwin qui est chargé d’appuyer les GI’s avant la libération d’Etreham dans la matinée. Mais la victoire est en demi-teinte, le repli allemand ayant pu se réaliser par un étroit couloir entre Sainte-Anne et Vaucelles. Malgré tout, 600 Allemands seront faits prisonniers au cours de l’opération.

La libération d’Isigny

Le village d’Isigny représente un point stratégique entre les plages de Utah et Omaha Beach. Il aurait dû être pris le jour même du Débarquement mais les violents combats sur le sable d’Omaha n’ont pas permis à la 29e division d’infanterie d’atteindre cet objectif. Le 8 juin les Américains lancent le 747e bataillon de chars au-devant du village. Dans le même temps, durant toute la journée l’artillerie de marine bombarde sans relâche les défenses allemandes déjà largement pilonnées par l’aviation américaine. Le village est en ruine, détruit à près de 80%. L’assaut est confié à la compagnie de tête du 175e régiment d’infanterie (29e division d’infanterie) qui franchit les lignes dans la nuit avant de libérer le village à 5 heures du matin. Isigny aura l’honneur de la visite du général de Gaulle lorsque celui-ci viendra en Normandie rétablir la légalité républicaine, le 14 juin 1944. Avec la prise d’Isigny la jonction entre les deux têtes de pont américaines devient dès lors plus envisageable.

Utah Beach

Le franchissement du Merderet

La troisième tentative de franchissement du Merderet sera la bonne après deux premiers échecs le 8 juin. Ce jour-là, le major général Gavin, commandant adjoint de la 82e Airborne, lance une nouvelle attaque depuis la chaussée de la Fière en direction de Cauquigny. Avec l’aide de fumigènes et l’appui de l’artillerie et des blindés, les parachutistes parviennent à s’installer à Cauquigny vers 11h00 et à élargir ainsi la tête de pont en direction des autres forces parachutistes isolées depuis le 6 juin à l’ouest du Merderet. Les pertes en hommes sont énormes. Le patron de la 82e le général Ridgway y installera pendant quelque temps son poste de commandement. Cet épisode marque la fin de la bataille du pont de la Fière dans laquelle les parachutistes américains perdirent beaucoup des leurs depuis le 6 juin.

3e et dernier assaut sur la batterie d’Azeville

Encore capable avec un dernier canon de 105 mm en état de marche de freiner l’avance américaine, la batterie d’Azeville résiste les 7 et 8 juin aux assauts répétés du 22e régiment d’infanterie (4e division américaine). Le 9 juin, après une intense préparation d’artillerie, le 22e RI repart une nouvelle fois à l’attaque, mais cette fois-ci avec des lance-flammes. Grâce à l’action héroïque du soldat Riley et de son lance-flammes qui réussit notamment à mettre le feu aux munitions de l’ennemi, le capitaine Treiber n’a d’autre choix que de se rendre avec ses 169 hommes. Le régiment poursuivra vers Quinéville et Ozeville, tandis que le 12e régiment (RCT) poursuivra sa marche en direction de Montebourg après avoir contourné Azeville.

Les secteurs britanniques

Gold Beach

La libération d’Audrieu

Au nord-est de Tilly-sur-Seulles, Audrieu est situé sur la route du 1er Dorset Regiment (50e division d’infanterie britannique) qui marche vers la cote 103. Le 8 juin, les troupes britanniques accompagnées des blindés du 4/7e Dragoon Guards sont aux portes du bourg. Face à elles, les grenadiers allemands de la 12e SS sont bien en place. Après de vifs combats Audrieu est libéré dans la nuit du 8 au 9. Mais les troupes britanniques sont stoppées autour de Tilly-sur-Seulles par les tirs d’une autre division allemande, la Panzer Lehr. Audrieu est alors repris et occupé le même jour par les Allemands. Brièvement occupé, puisqu’un ordre de repli est décidé par le commandant de la Panzer Lehr en direction de Tilly. C’est dans ce contexte que 26 prisonniers alliés, la plupart Canadiens, seront abattus par les SS et découverts plus tard autour du château de Pavie à Audrieu.

Le début de la bataille de Tilly-sur-Seulles

Pris et repris 23 fois entre le 8 juin et le 19 juin, le village de Tilly au sud-ouest de Caen fait partie des objectifs de la 50e division d’infanterie du général Graham qui a débarqué le 6 juin sur Gold Beach. Parvenus à la lisière de Tilly, les Britanniques se heurtent depuis le 8 juin aux troupes de la division Panzer-Lehr qui vient d’arriver sur le front de Normandie en se positionnant à l’est de la 12e SS. Le 9 juin tout passage est désormais interdit par les Allemands qui ont consolidé leurs défenses avec la totalité des éléments blindés de la Panzer-Lehr dont le PC est établi dans une ferme au sud de Tilly à égale distance de Villers-Bocage. Tilly aux mains des Allemands devait contraindre les Alliés à changer leur plan : pour percer le front à l’Ouest de Caen, ils leur faudraient désormais contourner cette position ennemie en portant leur attaque vers Caumont-L’éventé et Villers-Bocage.

Sword Beach

Nouvelle attaque sur Cambes-en-Plaine

Cambes-en-Plaine figure sur la liste des objectifs de la 3e division d’infanterie britannique depuis le 6 juin. Toutes les offensives se sont jusqu’à présent heurtées aux troupes de la 21e Panzer ou aux SS de la 12e Panzer. Une nouvelle tentative est confiée le 9 juin au 2e Royal Ulster Rifles avec l’appui des blindés du 1st East Riding Yeomanry. Après une préparation d’artillerie effectuée au large par le HMS Danae, l’assaut est lancé dans de très violents combats. Les pertes sont lourdes : 250 hommes sont perdus dont 45 tués. Le village reste sous le feu allemand, les fantassins s’enterrent sous les tirs de l’artillerie allemande qui se déchaine. Cambes-en-Plaine sera définitivement dégagé par les Alliés lors de l’opération Charnwood au début du mois de juillet 1944.

Dernière mission pour le cuirassé français Le Courbet

Réfugié en Angleterre en juin 1940 et affecté à la défense du port de Portsmouth durant la bataille d’Angleterre, le cuirassé Courbet a servi de navire école puis de navire caserne aux Forces navales françaises libres du général de Gaulle. 4 ans plus tard, il reçoit sa dernière affectation : prendre place au large de Sword Beach pour servir de brise-lame au large de Ouistreham et de Colleville. L’amiral Wietzel, le commandant du navire a été désigné pour le conduire vers les côtes normandes. Après avoir pris place au milieu du gooseberry 5, le Courbet se saborde à 13h30 en se posant par 11 m de fond. Ultime provocation pour les Allemands, il arbore pour l’occasion le drapeau tricolore à Croix de Lorraine. Il sera torpillé par les Allemands dans la nuit du 16 au 17 août 1944.

Le grand bunker de Ouistreham tombe aux mains des Anglais

À Ouistreham-Riva Bella, dominant la mer, le poste de direction de tir a été édifié par les Allemands à partir de 1942 dans le cadre de la construction du Mur de l’Atlantique. Haute de 17 mètres et répartie sur 5 niveaux, cette tour de béton fournit un point de vue exceptionnel aux observateurs d’artillerie allemands qui ont installé leur télémètre au cinquième niveau. C’est ce poste d’observation qui doit notamment donner les instructions de tirs aux 6 canons de la batterie d’artillerie installés face à la mer. Lorsque les commandos britanniques débarquent sur Sword Beach et s’avancent vers Riva Bella, la surprise est totale. Cette fortification n’a pas été identifiée sur les photographies aériennes, et n’apparaît pas sur les relevés fournis par la Résistance française. En revanche les Britanniques savent que 6 canons de 155 mm ont été mis en place près des écluses du port. Mais ce matin-là, les pièces d’artillerie ont disparu, elles ont été déplacées à l’arrière vers Saint-Aubin-d’Arquenay pour être mises à l’abri des bombardements. Durant trois jours les Britanniques ne tiennent pas compte de cette tour de béton qui visiblement ne représente aucun danger. Jusqu’à ce que les troupes du génie s’aperçoivent qu’elle est encore occupée. Dans la soirée, la décision est prise de lancer l’assaut. Le poste de direction de tir tombe aux mains du lieutenant Bob Orrell, et de trois de ses hommes du Royal Engineers. Après s’être introduits dans le bunker en détruisant la porte blindée à coup de charges d’explosifs, ils font prisonniers la garnison des 53 soldats allemands qui y vivaient retranchés depuis le 6 juin.

Le secteur canadien

Les Canadiens stoppent les SS à Bretteville-l’Orgueilleuse

Situé sur l’axe ferroviaire Paris-Cherbourg, Bretteville-l’Orgueilleuse a été libéré le 7 juin par les fantassins du Regina Rifles Regiment. Avec l’échec de leur l’avancée vers Authie, les Canadiens redoutent dès lors, une possible contre-attaque allemande sur leur flanc gauche. Celle-ci se produit dans la nuit du 8 au 9 juin, lorsqu’une vingtaine de panzer de la 12e SS et des éléments d’infanterie sous le commandement de Kurt Meyer attaque plein ouest depuis le village de Rots. L’engagement est furieux dans les deux camps, les combats se déroulent jusqu’au centre du village. Les Canadiens résistent jusqu’à l’aube, obligeant les grenadiers SS et les blindés de Meyer à se replier sur Rots. Les Allemands laissent dans ce repli une douzaine de blindés sur le terrain. Au matin du 9 juin, le bataillon canadien enregistre 170 tués dans ses rangs, mais pour la première fois Kurt Meyer a dû reculer sur le front de Normandie.

Le Royal Winnipeg Rifles anéanti à Putot-en-Bessin

Situé sur la N 13 entre Bayeux et Caen, Putot-en-Bessin a été libéré le 7 juin par le Royal Winnipeg Rifles, un des bataillons de la 3e division d’infanterie canadienne. La libération est de courte durée. En effet dans la soirée du 8 juin, une terrible contre-attaque menée par le 26e régiment de la 12e SS allemande anéantit trois compagnies d’infanterie et oblige les Canadiens à se replier. Après les combats, 256 hommes manquent à l’appel dont une centaine de tués. Mais le village de Putot n’est pas perdu pour autant, grâce au 1er Canadian Scottish Regiment qui prend le relais. Mais pour cette unité le prix à payer est lourd : 125 victimes dont 45 tués. 45 autres soldats canadiens capturés à Putot seront sommairement exécutés par les Allemands dans la région d’Audrieu.

Les forces allemandes

La 2e Panzerdivision se met en route

Engagée sur tous les fronts depuis l’invasion de la Pologne en 1939, la 2e Panzerdivision de von Lüttwitz est retirée du front de l’Est et mise au repos dans la région d’Amiens depuis l’hiver 1943-1944. Dans la nuit du 8 au 9 juin, les 15 900 hommes et les 200 chars de l’unité sont mis en alerte. Les colonnes motorisées se mettent aussitôt en route vers le front de Normandie, tandis que les engins chenillés sont transportés par voie de chemin de fer. D’excellente condition, très bien entrainée et très expérimentée, cette division blindée est un renfort de poids qui s’apprête à entrer dans la bataille. Les premiers éléments seront en place en Normandie entre Villers-Bocage et Caumont-L’éventé le 12 juin. Pour affronter les forces alliées, von Lüttwitz devra cependant se passer des engins blindés dont l’acheminement a été considérablement ralenti par les destructions des ponts et des voies de chemin de fer.

Von der Heydte se replie à Carentan

À la tête du 6e régiment parachutiste allemand, Friedrich von der Heydte combat sans relâche dans le secteur de Carentan depuis le parachutage de la 101e Airborne aux premières heures du 6 juin.  Les « lions de Carentan » comme les surnomment les paras américains, s’acharnent à tenir ce verrou, position stratégique entre les deux plages américaines d’Utah et d’Omaha. Depuis le 6 juin, des éléments du 6e régiment allemand  s’accrochent à Houesville, repoussant toutes les offensives américaines, jusqu’à ce que les parachutistes du 502e régiment les en délogent le 9 juin à l’issue de deux jours d’intenses combats. Von der Heydte a cédé mais a pris soin d’organiser le repli de ses hommes vers Carentan en franchissant les marais. Avec ce repli allemand la tâche des Américains pour s’emparer de Carentan s’avère plus difficile encore.

Les civils dans la guerre

Les bombardements du Rodney

À Caen, de violents bombardements de tirs de marine ont lieu durant la nuit. Vers 2h00 du matin, le clocher de l’église Saint-Pierre s’effondre du haut de ses 72 m dans la nef probablement atteint par un obus de 406 mm tiré depuis le large de Sword Beach par le HMS Rodney. S’ensuit un début d’incendie qui détruit la toiture de l’édifice.

Une grande partie de la population continue d’évacuer la ville, en se dirigeant notamment vers les carrières souterraines de Fleury-sur-Orne. Les centres d’accueil pour les populations civiles ne désemplissent pas à l’hôpital du Bon-Sauveur, à l’abbaye-aux-Hommes, au Lycée Malherbe, ou encore et dans les carrières de Caen.

Le souterrain de Saint-Lô

Une grande partie de la ville a été détruite par les bombardements aériens des 6 et 7 juin et 500 à 600 personnes ont été tuées sous les bombes. Pour échapper aux raids alliés, des centaines de civils ont trouvé refuge spontanément dans une grande galerie souterraine creusée par les Allemands à partir de mars 1943 sous le rocher de la ville. Lorsque intervient le Débarquement, les travaux ne sont pas encore achevés, mais les deux vastes salles et les galeries latérales peuvent être utilisées pour s’y abriter pendant les bombardements, mais aussi pour y loger les malades de l’hôpital civil voisin. Les Allemands qui ont autorisé l’occupation des lieux par les Saint-Lois, y logent aussi certains de leurs blessés et de leurs prisonniers américains. Mais le lieu n’est pas propice à la vie, l’eau et l’électricité viennent à manquer, les conditions d’hygiène sont déplorables, les Allemands ordonnent l’évacuation le 9 juin dans la matinée. Les derniers occupants quittent les lieux dans l’après-midi pour prendre le chemin de l’exode tandis que les malades et les blessés sont conduits vers le haras. Au même moment, le maréchal Montgomery donner l’ordre au général Bradley d’avancer au sud dans la direction de Saint-Lô.

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